
Je n’ai plus ce sentiment d’isolement

« C’est la course d’un jour »
Parler différemment !
À chaque fois que nous sommes confrontés à la barrière de la langue, la nouvelle application Talk différent se propose d’intervenir. Une nouveauté à la portée de toutes les bourses qui concernent les personnes handicapées et le monde « ordinaire ».
Comment converser avec une personne « non verbale » ? Que faire à chaque fois que l’on est confronté à la barrière de la langue ? Marie Spitz a répondu à toutes ces questions en mettant au point une application sur tablette et smartphone baptisée Talk different, littéralement parler de façon différente. Cette mère de famille a eu plusieurs enfants dont une fille, de 23 ans, aujourd’hui, atteinte d’autisme. « Je me suis consacrée à elle et, avec le soutien de mon mari, j’ai essayé plusieurs méthodes de communication. » Même si Marie Spitz a eu « la chance » de na pas avoir à travailler, elle a mené tambour battant une bataille digne d’une entrepreneure, couronnée par deux récompenses en novembre 2015 : lauréate des Trophées de l’Apajh et des Trophées de la communication.
Makaton
« J’ai essayé plusieurs outils avec ma fille, se souvient-elle. J’ai notamment utilisé le makaton qui repose en partie sur des pictogrammes. Mais cette méthode peut se révéler compliquée car elle est encombrante. Difficile de se déplacer avec toutes les images ! Que faire quand on les oublie ? De plus, les parents qui manquent de moyens doivent apprendre à fabriquer les images par eux-mêmes et plus l’enfant avance en âge, plus il y a de pictos ! » En grandissant, la fille de Marie a commencé à rejeter le makaton et a montré un réel intérêt pour l’informatique. « Nous lui avons offert une tablette pour ses 18 ans. Elle allait sur les moteurs de recherche pour trouver des images d’animaux et apprendre à écrire le mot cheval, par exemple. » C’est à ce moment-là que Marie Spitz à cherché une application sur internet qui permette à sa fille d’évoluer. Et cette petite équipe familiale soudée s’est transformée en start up.
Propre projet
« Toutes les applications que j’ai trouvée ne m’ont pas convaincue. Elles étaient soit en langue anglaise, soit il manquait une charte graphique, soit le prix dépassait les 150 euros. » Alors Marie se lance, forte de deux maximes : « si ton projet est bon, tu trouveras l’argent. Les gens se mettent trop de freins ! » « J’ai rédigé mon propre projet d’application pour échanger avec des gens qui manquent de communication verbale mi 2013 et j’ai rencontré un financeur qui a estimé que j’étais en train de créer un langage universel. Je suis repartie avec un gros chèque. J’ai commencé à élaborer mon projet, jours et nuits, j’avais l’impression de vivre une nouvelle grossesse. » De fil en aiguille, Marie Spitz choisit un prestataire issu de Cap Gemini qui développe avec elle l’application. « Il y a eu des hauts et des bas. Je tenais à ce que le projet reste fidèle à mon idée. Mais nous y sommes finalement arrivés début 2015. »
Utile partout
La vision de Marie est très personnelle car elle ne souhaite pas se cantonner au handicap : « Je ne suis pas très académique, concède-t-elle. Je voulais une application utile bien sûr au monde du handicap, mais je voulais aussi qu’elle soit utile partout. De fait, elle est déclinée en 9 langues. Elle vise aussi les jeunes, mais aussi les immigrés et pourquoi pas les touristes ! À chaque fois que nous sommes confrontés à la barrière de la langue, je voudrais que Talk différent puisse répondre.» Sur le modèle économique, Marie se veut également iconoclaste puisqu’elle a refusé de vendre son application 90 euros, « cela aurait été le juste prix ! » Elle la propose à 0,99 euro car elle souhaite la généraliser au monde ordinaire et ne veut pas imposer une double peine aux familles modestes qui élèvent des enfants en situation de handicap. Son application qui se veut citoyenne (les mises à jour sont gratuite) a déjà été téléchargée à 10 000 exemplaires de par le monde. « Je vise le million », lâche Marie Spitz.